Nouvel accord de libre-échange : Êtes-vous prêt ?

De l’ALENA, en vigueur depuis 1994, nous passerons ce 1er juillet à l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Signée par les trois chefs d’état en novembre 2018, la nouvelle entente était restée bloquée au Congrès américain jusqu’en décembre dernier; les instances en place voulant en changer certaines dispositions. Le Congrès américain a finalement consenti à sa ratification en janvier, suivi du Canada le 13 mars ; l’ACEUM entrera donc en vigueur selon l’échéancier prévu. Certains milieux, en particulier l’industrie automobile, auraient préféré retarder le processus en raison de la pandémie, mais ils n’ont pas eu gain de cause.

Il faut donc rapidement nous préparer aux changements à venir, qui ne sont d’ailleurs pas majeurs, excepté pour l’industrie automobile. Elle va ainsi devoir s’ajuster à des règles d’origine plus exigeantes au niveau des pourcentages de valeur régionale, comme le contenu d’acier et d’aluminium. Il y a aussi des exigences salariales : 40 % du contenu des véhicules devra avoir été produit par de la main-d’œuvre payée au moins 16 $ de l’heure, afin d’assurer des conditions de travail respectables aux travailleurs de cette industrie.

Des changements moindres aux règles d’origine vont aussi avoir un impact sur l’industrie textile, certains produits chimiques, cosmétiques et pharmaceutiques. Il sera donc important de vérifier et comparer l’annexe 401 de l’ALENA et celle 4-B de l’ACEUM pour identifier les changements et les nouvelles règles en vigueur.

Pour les produits laitiers, la volaille et les œufs, le Canada a augmenté les contingents d’entrée en franchise de produits américains représentant 3,6 % de notre marché, soulevant les inquiétudes des producteurs canadiens.

Changement aux certificats d’origine

Au niveau documentaire, le seul changement majeur est le fameux Certificat d’Origine ALENA, qui est aboli et remplacé par une certification d’origine. Cette dernière doit contenir des éléments obligatoires, qui sont d’ailleurs les mêmes que ceux du certificat, mais peut être produite sur une formule libre, par exemple sur une facture commerciale. Autre nouveauté, elle peut être émise par le producteur, l’exportateur mais aussi l’importateur. Ceci peut sembler pratique, mais un importateur prendrait un risque s’il produisait une déclaration d’origine en son nom, sans justificatif émis par l’exportateur ou le producteur. 

Impact sur le commerce électronique

Une autre disposition de l’Accord aura quant à elle un impact sur le commerce électronique. En effet, l’exemption « de minimis », qui permet l’importation de produits en franchise de droits et taxes, passe de 20 $ à 40 $ pour la TPS et de 20 $ à 150 $ pour les droits de douane. Ceci favorise le commerce électronique, au détriment des commerces physiques canadiens. Cette exonération s’appliquera aux produits de toutes origines lorsque qu’ils sont expédiés des États-Unis ou du Mexique par service de messageries. Pour les envois qui entrent via Postes Canada, le seuil demeure à 20 $. Ceci dit, le Canada et le Mexique ont tout de même résisté aux pressions américaines d’augmenter le seuil à 800 $US, comme c’est le cas chez eux. Tout client américain peut en effet importer jusqu’à 800 $US par envoi et ne paie ni droits de douane, ni taxes, ce qui explique, en partie, la croissance du commerce en ligne aux Etats-Unis ces dernières années.

Pour terminer, l’ACEUM contient une clause crépusculaire de 16 ans, avec prolongation possible de 10 ans. Ça n’est donc plus l’union pour la vie, comme c’était le cas avant, mais pour 16 ans, ou peut-être 26, si tout va bien : un mariage de raison et non un mariage pour l’éternité! Cette nouvelle entente est la bienvenue car elle lève enfin les incertitudes qui planaient depuis le démarrage du processus de renégociation. En effet, le président américain menaçait d’annuler purement et simplement l’ALENA il a y quelques temps. Elle procure également à nos entreprises une excellente opportunité de profiter de la reprise économique post Covid-19. 

N’oubliez pas ces quelques étapes importantes

Pour repartir du bon pied, il faut néanmoins avoir fait ses devoirs. Assurez-vous d’avoir :

  • Valider la conformité de ses produits
  • Comparer les nouvelles règles d’origine aux anciennes
  • Veiller à la traçabilité de ses éléments de conformité douanière
  • Réévaluer, au besoin, ses sources d’approvisionnement

L’équipe d’Export Outaouais et moi pouvons d’ailleurs vous appuyer dans ces démarches.

Quant à savoir si la certification d’origine sur format libre qui remplace le Certificat d’origine ALENA va créer des retards ou de la confusion à la frontière, nous le saurons le 2 juillet.

En attendant, bonne reprise et bon été à toutes et à tous!

 

À PROPOS DE L’AUTEUR

Christian Sivière, Solimpex

Formateur et consultant sur les aspects logistiques, réglementaires et douaniers du commerce international, les accords de libre-échange et la gestion de la chaîne d’approvisionnement

©Tous droits réservés, juin 2020

 

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